Le deuil : un processus de changement

Le deuil se définit communément comme une étape marquée par la tristesse, consécutive à la disparition d’une personne proche. Il s’agit là d’une définition de base mettant l’accès sur la mort physique d’un être et sur la peine que celle-ci engendre.

Je propose de revisiter cette définition en considérant le deuil comme une transition entre un état passé, révolu, et un état actuel. Le deuil est de la sorte un processus de changement, c’est-à-dire une succession d’étapes avec une certaine dynamique, et non un état statique.

Le processus de deuil ne se limite pas à la mort physique d’un être mais intègre toutes les situations impliquant un changement et un nouvel équilibre. En l’occurrence tout changement de situation peut être considéré comme un deuil. Par conséquent, proposer un changement dans une organisation implique de tenir compte du processus dynamique du deuil et des étapes par lesquelles passent les individus.

Le changement présuppose de sauter dans l’inconnu, et engendre une dose de stress propre à chacun.

Dans notre époque où la culture de l’innovation nous pousse à recréer chroniquement notre environnement de vie, le deuil est omniprésent. Autant nous y préparer.

 

Les étapes du deuil.

Elisabeth Kübler-Ross a défini quatre grandes étapes rencontrées par l’individu suite à une perte, ces étapes étant de durée et d’intensité variables selon les individus.

Le choc. L’individu est confronté à une perte dans son environnement, cet événement ayant une importance relative pour la personne.

Etape 1 : le déni. La personne occulte la perte et refuse de croire en la réalité de l’événement. Elle rejette inconsciemment l’information et continue d’agir comme elle le faisait auparavant.

Etape 2 : La colère. Face à la réalité constatée et inévitable du choc, l’individu se révolte et entre dans un état de colère, contre soi ou envers son environnement. Lors de cette étape, l’individu peut également se mettre à marchander afin de ne pas faire face à la situation. Il tente par ces manœuvres de retrouver son équilibre passé.

Etape 3 : La tristesse. L’individu comprend que le retour en arrière est impossible, il cesse de lutter face à la perte endurée et entre dans un état de tristesse, intégrant consciemment la perte. L’événement s’est bel et bien produit, c’est un fait.

Etape 4 : L’acceptation. La personne accepte et intègre la perte et se réorganise afin de retrouver un équilibre. Le vide fait place à l’espace, et l’espace ne demande qu’à être investi de nouveau. La personne retrouve son allant et s’adapte à son nouvel environnement, dont l’événement initial a bouleversé l’équilibre.

 

 

Les types de deuils.

Le deuil fait souvent référence à la mort physique d’un individu. Cependant, en considérant le deuil comme un processus de changement, il concerne tout événement venant bouleverser l’environnement de l’individu et se limite pas à un décès mais s’applique à différents domaines dans nos vies.

Sans être exhaustif, et à titre d’exemple, ces domaines sont d’ordre

  • relationnel (ex : perte d’un proche qui modifie l’espace relationnel)
  • physique (ex : perte d’autonomie qui modifie son rapport à ses capacités)
  • statutaire (ex : promotion manquée qui modifie les plans de carrière)
  • matériel (ex : perte d’un objet qui modifie notre attachement)

Tout changement qui modifie notre rapport à l’environnement implique un processus de deuil, plus ou moins important selon la valeur de la perte pour la personne.

 

Ce ne sont là que quelques exemples qui illustrent les événements divers par lesquels un individu passe et qui modifient la structure qui encadre la personne. Celle-ci se trouve par conséquent soumis à un stress, plus ou moins important selon les situations et selon les individus.

 

Préparer le processus de changement

Chaque changement occasionne une tension interne, un stress que l’individu doit gérer pour surmonter l’épreuve. Un processus de changement implique un processus d’apprentissage : franchir les étapes d’un deuil revient à intégrer les modifications engendrées dans son environnement et d’appliquer les options adéquates pour s’adapter aux mieux au changement. Cette dynamique et cette aptitude à gérer les étapes atténue l’effet du stress engendré par le changement.

En reprenant les étapes vues précédemment et sous l’angle de l’apprentissage, les 4 étapes sont :

 

Etape 1. Le déni : l’incompétence inconsciente.

L’individu n’a pas intégré la modification de son environnement et se défend de voir la réalité et ses changements. La perte a généré un choc important : pour se défendre de cette perte, il va continuer sa vie, comme ignorant ce qui s’est produit. Il agira comme si rien ne s’est produit. Il est inconsciemment incompétent : il ne sait pas qu’il ne sait pas.

Il méconnaît le stimulus (le choc). Le succès de cette étape est l’assimilation du changement qui devient conscient : l’environnement connu n’est plus le même, l’individu est en déséquilibre, donc en position d’inconfort.

 

Etape 2. La colère : l’incompétence consciente.

L’individu a intégré que l’environnement a changé et perçoit désormais l’inconfort de la situation. Il ignore encore comment gérer ce changement qui lui occasionne à ce stade plus d’inconvénients que d’avantages. Il va chercher dans un premier temps à modifier ou faire modifier l’environnement de sorte à retrouver l’équilibre passé. Il s’agit d’une demande magique par laquelle la personne souhaite remonter le temps de sorte à ne plus souffrir de la perte de repères induit par le changement.

Il méconnaît le problème : l’environnement ne reviendra pas à l’état initial. Le succès de cette étape est la prise de conscience que les événements se sont effectivement produits, que l’environnement a changé. Il doit apprendre que c’est à lui de retrouver son équilibre, pour retrouver des repères, de la structure, de la sécurité.

 

Etape 3. La tristesse : la compétence consciente.

A cette étape, l’individu a accepté que l’environnement ne reviendra pas à son état passé. Peu à peu, il va devoir s’accommoder à son nouvel environnement. La tristesse est une émotion par laquelle l’individu va se tourner vers le retrait. Cette prise de recul va lui permettre de progressivement d’élaborer la perte et l’impact que celle-ci a sur lui. Il développe insidieusement les capacités à y faire face. La personne va mobiliser les forces nécessaires pour retrouver un nouvel équilibre.

Il méconnaît les options qui s’offrent à lui durant ce stade. Le succès de cette étape est de lever progressivement cette méconnaissance et de prendre conscience des options qui s’ouvrent à lui, des actions qu’il sera en capacité de mener. Ces options arrivent en ordre désordonné, sans structure et sans efficacité certaine : elles ne sont alors que des germes qui vont progressivement croître.

 

Etape 4. L’acceptation : la compétence inconsciente.

A ce stade, l’individu a intégré la perte, le caractère inéluctable de celle-ci et ses capacités d’y faire face. Il sait que c’est à lui d’agir. Durant cette phase, il va explorer les options visitées au stade précédent. Il apprend et applique ses différentes options jusqu’à trouver un nouvel équilibre qui lui convienne.

Il méconnaît ses capacités à appliquer efficacement les options. Le succès à ce stade est d’intégrer ses capacités à agir et de passer à l’action afin  de trouver le nouvel équilibre suite à la perte vécue.

 

Etapes du deuil Processus de croissance Méconnaissance Succès
Déni Incompétence inconsciente Stimulus (Choc) Prise de conscience de la perte et de son caractère inéluctable, L’environnement a changé
Colère Incompétence consciente Problème Conscience de l’impact sur soi et qu’il n’y aura pas de retour en arrière : nous ne pouvons changer l’environnement.
Tristesse Compétence consciente Options Conscience de sa propre capacité à réagir et intégration des options qui sont les nôtres.
Acceptation Compétence inconsciente Capacité à agir Applications des options pour un retour à l’équilibre

 

Succession des cycles et blocages à un stade

Les changements sont une réalité quasi quotidienne pour chacun de nous. Il est important dans notre croissance et pour la croissance de nos organisations que les étapes de deuil soient franchies avec un maximum de souplesse pour conserver l’équilibre. C’est à ce prix que nous pouvons accepter le changement et nous y adapter.

Il arrive que certaines personnes butent sur une étape et vivent une succession inachevée de cycles. Ils semblent comme enfermés à un stade. Par exemple, nous rencontrons des personnes qui vont buter sur l’étape de la colère et exiger en tout temps le retour à un passé perdu, tandis que d’autres peuvent buter sur l’étape de la tristesse, semblant inconsolables et dénués de la maîtrise de leur sort.

 

Accompagner le changement

Accompagner les individus, les équipes ou les organisations lors d’un changement revient à identifier le stade dans lequel ils se trouvent et de leur permettre d’expérimenter les passages dans ces différentes étapes.

Gérer le changement revient à favoriser l’apprentissage et la maturité des personnes. La résistance au changement provient d’une fixation à un stade et lever cette résistance passe par un travail sur les méconnaissances propres à chaque étape.

 

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