La crise que nous traversons modifie notre rapport à l’activité en occasionnant un changement profond quant à notre environnement de travail. Les entreprises ont eu à s’adapter très rapidement pour protéger leurs collaborateurs, tout en cherchant à maintenir leur activité. Tant bien que mal.
Ce changement brusque n’est pas sans conséquence sur notre psyché et gardera un impact pendant un temps certain, d’autant que les protocoles mis en place à cette occasion nous rappellent sans cesse un état de fait : notre environnement a bougé et notre rapport à celui-ci s’en trouve bouleversé.
Pour autant, les organisations, tout comme les hommes, sont des entités psycho-sociaux-économiques, et le défi sanitaire que le contexte nous impose ne doit pas occulter d’autres challenges. Il convient donc de garder à l’esprit que le développement d’une structure repose sur des bases individuelles (psycho), collectives (socio) mais également productives (économiques).
Je propose de partager mes observations du terrain sur les comportements inadéquats que j’ai pu rencontrer et qui à mon sens pénaliseront le développement serein d’une organisation, pour ensuite fournir des pistes d’approches relationnelles pour favoriser la reprise de l’activité, dans le respect de la sécurité du groupe.
Les comportements passifs.
Le retour sur site se profile ou a déjà été acté totalement ou partiellement, et de nouveaux protocoles d’accès au travail sont en place et sont perçus différemment par chacun de nous. Plus encore, cette reprise progressive a lieu après un épisode inédit : le confinement de la population. Cette expérience inédite et soudaine a laissé des traces soit visibles soit intangibles chez chacun de nous, nous intimant d’autant plus à la vigilance quant à notre reprise. Pour maintenir un niveau d’activité convenable, il s’agit de trouver le bon dosage entre sécurité et action.
J’ai répertorié 4 types de comportements en m’inspirant des comportements passifs décrits par l’Analyse Transactionnelle et qui s’avèrent contreproductifs et qui à terme vont pénaliser l’activité du groupe. Nous les appelons comportements passifs parce qu’ils nuisent à l’efficience de l’activité.
Ces comportements passifs révèlent un manque que les managers auront à déceler pour maintenir l’activité dans un cadre sécure, et ce, sans aller dans un excès de sécurité, ni dans un excès d’activité.
L’abstention
L’abstention est une manifestation passive évidente. Face à la situation de reprise, la personne fait preuve d’inactivité par inhibition, ne sachant que faire ni comment le faire.
La personne peut soit faire preuve d’abstention sur la sécurité : elle reprend son activité comme si la période de confinement n’avait pas existé et va occuper son poste exactement comme avant. Si l’abstention porte sur l’activité, la personne va dispenser toute son énergie à mettre en place des protocoles de sécurité qui lui apporteront un maximum de confort et de réassurance mais qui va s’avérer éminemment inefficace.
La suradaptation
La suradaptation est un comportement par lequel la personne va anticiper les besoins de son environnement, quitte à faire plus que sa part de travail. Cette personne réagit excessivement aux demandes, elle en fait trop.
En se suradaptant par rapport à la sécurité, la personne va mettre en place des protocoles sanitaires à la place de ses collègues, sans y avoir été sollicitée. Elle va dès lors occuper un temps conséquent à se préoccuper des besoins des autres dont elle imagine devoir endosser la responsabilité. Face à cet excès d’attention, elle disposera de moins de temps pour effectuer ses propres tâches.
Sur le volet de l’activité, la personne en suradaptation va faire plus que son travail. Elle anticipe la baisse d’activité dans son entourage et s’acquitte d’une part de travail qui initialement ne lui incombe pas. Ce surcroît d’activité se fait au détriment de sa sécurité. Négligeant dès lors tout ou partie des protocoles sanitaires, elle met en risque sa personne ainsi que son entourage.
L’agitation
L’agitation vue de l’extérieur donne une sensation d’hyperactivité. Cependant, une personne qui cède à l’agitation génèrera beaucoup de mouvements mais peu vont profiter à l’activité réelle. Faute de but constructif et d’actions structurées, la personne se lance dans des tâches désordonnées et donc inefficaces.
Une personne en pleine agitation va passer du coq à l’âne et alterner, sans logique apparente les protocoles sanitaires et les tâches liées à l’activité. En pleine activité, la personne peut très bien s’orienter rapidement vers une mesure sanitaire, arguant par exemple un oubli, avant de retourner succinctement à son activité comme par exemple envoyer un mail avant de reprendre la mesure sanitaire entamée.
L’agitation confère à l’environnement une sensation de tumulte et de mouvement perpétuel, sans en saisir le sens ou la finalité.
La violence / l’incapacitation
La situation que nous vivons met en balance activité et sécurité. Faute d’une perception suffisante de disposer de moyens de réaliser son activité en toute sécurité, une tension interne se fait sentir, se manifestant soit par de la violence (colère tournée vers l’extérieur) soit par une incapacitation (colère tournée vers soi).
Axée essentiellement sur la sécurité, une personne peut se montrer violente ou agressive quant aux protocoles sanitaires qu’elle estime insuffisants pour protéger les individus. Cette perception d’insécurité peut également se matérialiser par des tensions internes et se manifester par des douleurs telles que les maux de tête, les nausées, une sensation de malaise, des tensions musculaires allant jusqu’à la maladie.
Axée essentiellement sur l’activité, le collaborateur peut se montrer virulent quant à la baisse de rythme d’activité dû au mode dégradé imposé par de nouvelles conditions de travail. Certains managers ont par exemple eu l’indélicatesse d’entamer la reprise par un « Fini les vacances ! » à ses collaborateurs, véhiculant sa frustration face à la situation. D’autres vont vivre la situation en ressentant une tension interne, ressentie par des douleurs similaires à celles décrites plus haut (maux de tête, crispation, maladie).
Récapitulatif.
La reprise d’activité ressemble fort à une nouvelle prise de poste où les règles et protocoles sont à adopter pour pouvoir s’engager efficacement dans son activité.
Voici un tableau qui reprend les comportements passifs, selon leur orientation (quasi) exclusive soit vers la sécurité soit vers l’activité.
Chers dirigeants et managers, que préconiser pour faciliter la reprise ?
Souvenez-vous de votre première prise de poste. Vous vous retrouviez dans un environnement nouveau dans lequel vous aviez à adopter les codes, tout en vous concentrant sur une activité nouvelle. Quels sont les éléments qui vont ont motivé à rester dans cet environnement pour réaliser vos actions ?
Progressivement dans votre parcours, les difficultés à trouver votre rythme et les inquiétudes au fil de vos réussites ont fait place à une compréhension accrue de la situation, au point de devenir progressivement un spécialiste, maîtrisant les activités et les codes.
Pour aborder cette nouvelle phase, il vous faudra ménager chèvre et choux : l’activité et les nouveaux codes.
D’un côté, il est important de prendre en compte un environnement anxiogène, et potentiellement difficile selon les personnes.
- Soyez à l’écoute et attentif aux subjectivités de chacun concernant la situation ;
- Identifiez les personnes fragilisées ;
- Echangez sur l’environnement de travail : les mesures collectives mises en place ;
- Echangez sur les aménagements éventuels : les mesures individuelles pour accroitre la sensation de sécurité.
D’un autre côté, il y a l’activité à mener dans ce nouveau cadre, en maintenant un niveau de productivité suffisant pour satisfaire la clientèle :
- Echangez sur l’activité durant le confinement (avantages / inconvénients) ;
- Partagez les apprentissages tirés de cette crise pouvant faire évoluer le travail ;
- Donnez du sens à votre activité (à quoi contribue-t-elle de plus grand ?) ;
- Confiez des objectifs cohérents avec les moyens actuels et avec les nouveaux besoins de la clientèle.
Il est primordial de poser un cadre qui soit suffisamment sécurisant (protocoles) et motivant (sens et activité) pour redynamiser les équipes durant l’épisode que nous traversons. Votre rôle de manager prend alors toute sa dimension.
Conclusion
Cette période ouvre la voie vers une nouvelle manière d’aborder son travail et crée une fabuleuse opportunité pour générer un esprit de corps au sein des équipes, tout en maintenant un niveau de productivité élevé.
Il appartient aux managers de poser les conditions des réussites futures et aux collaborateurs de solliciter leurs responsables pour y parvenir. L’avenir à ceci de confortable, il se trouve toujours devant nous et n’attend que nos actions pour se construire.
Vous souhaitez en savoir plus sur les comportements passifs? Vous voulez aider vos managers à adopter la posture la plus propice à une reprise d’activité, nous nous ferons un plaisir d’échanger avec vous : contact@bright-up.fr
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